Depuis plus de deux ans maintenant, j’ai pour projet de développer LE site de référence pour l’achat et la vente et de jeux vidéo.

Pour réaliser cet objectif, j’avais mis en ligne le site valgames.com (aujourd’hui hors service pour les raisons que je vais évoquer dans cet article). Valgames avait pour objet la mise en relation des joueurs en fonction de leurs “goûts vidéo-ludiques” et de leur proximité géographique.

Ce projet qui a nécessité un certain investissement en temps et en argent, a été suspendu suite à une mésaventure qui finalement m’aura beaucoup appris. Bien que la perte soit sèche et douloureuse financièrement, il n’est pas question d’abandonner ce projet. Nous disposons aujourd’hui du réseau et de l’expérience nécessaire pour relancer notre site internet.

Je vais donc au travers cet article, vous expliquer :

1. Notre mésaventure

2. Comment éviter ce type de désagrément à votre projet web

3. Où nous en sommes aujourd’hui.

Ces lignes ont pour objet d’éviter à d’autres personnes de rencontrer ce genre de problème.

Par ailleurs, j’avais tant parlé de ce projet, que je devais des explications à tous ceux qui avaient commencé à utiliser Valgames. Pendant plus de six mois, j’ai dû garder un silence pesant quant aux avancements du site, j’ai dû rester vague et détourner la conversation lorsqu’on me posait des questions, et aujourd’hui que nous sommes prêts à reprendre en main le projet, je veux en donner la raison.

 Notre mésaventure

Tout commence il y a maintenant presque trois ans sur France Retrogaming : je voulais installer un module de petites annonces afin de séparer les ventes du forum. En effet, déjà à l’époque le nombre de ventes effectuées sur le forum commençait à polluer les discussions.

Suite à de multiples tentatives vaines pour installer ce module de petites annonces, je décide d’en faire un site indépendant. Je m’y colle seul, en utilisant différents scripts php. Mais vous savez comment c’est, au fil des avancements d’un projet, de nouvelles idées viennent s’ajouter au concept de départ. Alors que je ne souhaitais faire qu’un simple site de petites annonces comme il en existe des milliers sur la toile, et qui ne serait qu’une extension d’un site déjà en ligne (France Retrogaming donc), de nouvelles aspirations venaient faire de ce projet un site indépendant et innovant, autant dans le milieu des sites d’annonces en ligne que dans le milieu des sites de jeux vidéo.

En tant que joueur sur tous supports, et collectionneur assidu, j’ai fait de nombreuses transactions sur le web, en tant qu’acheteur, mais aussi en tant que vendeur. Je connais parfaitement les besoins des joueurs et des collectionneurs.

Mon projet de petites annonces se transformait peu à peu en un concept inédit sur le web, à savoir un site de mise en relation dans les échanges grâce à des fonctionnalités sociales et de géo-localisation.

Seulement voilà, à ce stade là, il ne s’agissait plus de quelques scripts php à mettre en place. Je décidais donc de faire appel à un prestataire pour m’aider dans la réalisation de ce projet.

Direction codeur

Codeur.com est un site qui met en relation prestataires du web et porteurs de projet internet.

J’y poste mon projet de site : Site géo-social de petites annonces de jeux vidéo, et je joins à ma demande un cahier des charges.

C’est là que j’ai fait une grosse erreur. Si j’avais pu imaginer que mon projet prendrait de l’ampleur dans l’avenir, j’aurai été bien plus précautionneux. Mon cahier des charges dressait simplement la liste des développements et des fonctionnalités attendus pour mon projet de site internet.

Je reçois de nombreuses offres de prestataires me proposant la réalisation du site pour différents budgets allant de 1000 à 2500€. En parallèle, je lançais une session de vente de mes jeux Super Nes sur ebay pour amortir une partie de mon investissement. Je sélectionne ensuite un prestataire après m’être entretenu par téléphone avec plusieurs d’entre ceux qui m’avaient fait les propositions les plus pertinentes pour mon projet.

S’en suit plusieurs mois de collaboration avec le prestataire, qui trouvait l’idée géniale, et qui ne manquait pas de me témoigner à quel point il était emballé de travailler sur ce projet.

Déjà à l’époque, j’aurais dû me méfier, car la mise en ligne a eu plusieurs mois de retard sur le délai de réalisation prévu, mais en plus la liste des développements n’était pas achevée, et certains points du cahier des charges avaient été modifiés. Cela dit, je m’entendais vraiment bien avec le développeur : il était cool, et semblait honnête et compétent. Je ne lui tînt pas rigueur de ces retards, malgré le coût que représentait ce projet.

Après la mise en ligne du site, je reçus de nombreux soutiens, beaucoup appréciait l’idée, et en à peine trois mois de temps le site comptait déjà plus de 400 inscrits pour près du double d’annonces en ligne. Mon projet était salué et encouragé, au point que je décidais rapidement de le faire évoluer. J’imaginais alors de nouvelles fonctionnalités, et surtout un modèle économique. Puisque le site plaisait et que je décidais d’investir encore, il fallait que je trouve un moyen de rentabiliser ses évolutions et son fonctionnement.

C’était parti pour la création de services professionnels. 

Pour monétiser le site, je voulais qu’il soit désormais possible de créer une boutique en ligne pour les professionnels.

Je contactais donc mon prestataire qui était entre temps réellement devenu un ami : nous nous étions rencontrés plusieurs fois, et au delà de la relation de travail qui nous unissait, nous avions de nombreux points communs. Nous en étions venus à communiquer quotidiennement sur Skype.

Il me fît un devis pour ces nouvelles réalisations. Le coût de ces développements était important et trop lourd à assumer seul. Il fallait donc que je trouve quelqu’un avec qui m’associer sur ce projet. C’est ainsi que je contactais mon vieux pote Théo, un bon geek cinéphile et amateurs de jeux vidéo (que je connais depuis de nombreuses années -ça date du lycée). Je lui parlais de Valgames, je lui présentais la partie déjà en ligne, ainsi que mes idées pour l’avenir du site. Il adhéra immédiatement, et c’est ainsi qu’il me rejoignit dans cette aventure, supportant avec moi le coût des nouveaux développements.

Nous lancions donc ces nouveaux développements, avec nouveau cahier des charges. Encore une fois, le résultat ne correspondait pas parfaitement aux besoins listés sur le cahier des charges ; encore une fois le projet avait du retard ; et surtout le site était lent et de nombreux bugs subsistaient, ce qui était très gênant depuis que nous avions décidé d’employer une partie de nos fonctionnalités pour les professionnels.

Mais le projet plaisait, nous tenions une communication soutenue sur les réseaux sociaux, et en à peine une semaine, trois professionnels du secteur de la vente de jeux vidéo décidaient de tenter l’aventure avec nous et de profiter de nos services.

Aller encore plus loin

Fort de ces succès répétés, et de l’engouement provoqué par ce projet, je décidais de l’emmener encore plus loin. Quelques mois plus tard, après avoir participé à un salon en tant qu’exposant au nom du site, nous voulions faire de ce projet une véritable activité.

Nous décidions donc d’investir à nouveau. Cette fois-ci, nous avions pensé le site à plus grande échelle, nous avions réalisé un cahier des charges complet, nous avions tenu compte des problèmes rencontrés suite à chaque série de développements, nous avions mis de coté un budget communication… Nous n’avions rien laissé au hasard afin de proposer un site complet, fonctionnel, et utile pour les joueurs comme pour les pros du secteur.

Le retournement de situation

Notre développeur, que nous payions pour chacun des développements, et même entre chaque nouveau contrat pour la maintenance du site et la résolution des bugs, commençait à changer son comportement, et la perspective que notre projet puisse devenir plus important que prévu lui fît “tourner la tête”. Je pense aussi que la relation amicale que nous avions développée le mettait (trop) en confiance, et désormais il ne nous considérait plus vraiment comme des clients, ce qui altérait clairement son professionnalisme.

A peine 10% du cahier des charges furent réalisés, et sur une période de trois mois et demi au lieu du délai de un mois qui avait été prévu dans notre contrat pour l’ensemble des points listés. Nous refusions donc de payer la partie restante tant que les développements prévus ne seraient pas réalisés.

Mais notre ami ne se laissa pas démonter, invoqua qu’il avait besoin de cet argent pour vivre, et qu’il cesserait de travailler tant qu’il n’aurait pas été payé. Ayant aussi bêtement que naïvement confiance en lui, je réglais la dernière partie restante. C’est alors qu’il nous informa qu’il avait été embauché par une entreprise (il était jusqu’alors indépendant), et que désormais il ne pourrait travailler sur notre projet que deux heures par jour (une heure le matin, et une heure le soir, dans les transports en commun, en allant et en rentrant du travail) et pour un tarif horaire quatre fois supérieur à celui que nous le payions jusqu’alors !

Le pire reste à venir !

En l’état actuel des choses, les nouveaux développements inachevés rendaient le site entièrement non fonctionnel. Et le chantier laissé en friche était si important qu’embaucher un nouveau développeur nous était impossible, puisque nous venions de dépenser une grande partie de notre budget.

Il nous était encore possible de puiser dans quelques ressources pour au moins remettre le site en état de marche. Mais était-ce une bonne idée ? Ne valait-il pas mieux arrêter les frais, déjà si importants, et accepter l’échec ?

Et bien de toute façon, notre développeur ne nous laisserait pas le choix. Puisque nous n’acceptions pas sa proposition de travail dans les transports en commun, et que nous préférions travailler avec quelqu’un d’autre, il allait maintenant nous demander de l’argent pour “les droits d’auteur” du code du site. Sans quoi nous n’avions pas le droit de faire intervenir un nouveau développeur sur son code non fonctionnel, car cela pourrait “dénaturer son oeuvre“.

Je tombe de haut. Je ne peux m’empêcher de penser que le mec rêve !

Et bien non. Dans la loi, tout lui appartenait, enfin, du moins le contenant. Certes nous étions propriétaires du contenu, mais il était propriétaire des droits d’utilisation, de diffusion, et d’exploitation du code source.

Au delà du sentiment d’injustice, du travail anéanti, de l’argent perdu, de la crédibilité-web balayée, c’était une grosse déception sur le plan amitié. J’aimais beaucoup cette personne, et je ne comprenais pas qu’il puisse agir ainsi, lui qui connaissait très bien l’importance qu’avait pour moi ce projet.

Après une semaine passée à déprimer, je reprenais les rennes du projet et refusais d’abandonner ; je décidais d’aller au bout.

Heureusement, je suis bien entouré : je contacte un ami d’enfance aujourd’hui avocat spécialisé dans la propriété intellectuelle. Je lui transmet nos contrats et tous les documents qui avaient régis notre collaboration depuis deux ans. A mon grand étonnement, il me confirma que, étant donné que nos cahiers des charges ne prévoyaient pas la cession des droits, le développeur pouvait nous réclamer une contrepartie financière en échange de ces droits. Mon avocat m’expliqua aussi qu’il s’agit du litige type entre prestataires et porteurs de projet. Il voit ce genre de problème quotidiennement, et aussi absurde que cela puisse paraître, ce sont les prestataires qui ont gain de cause sur ce type de litige, 99% du temps.

En effet la loi qui protège les auteurs date de 1948, une époque où internet n’existait pas, elle est donc complètement inadaptée. Cette loi sera certainement amenée à être modifiée dans les années à venir car les nécessités d’ordre commercial des relations développeurs/porteurs de projet ne peuvent continuer à faire l’objet de telles injustices.

Bref, vous imaginez bien à quel point j’étais dépité, j’avais le sentiment de me faire escroquer.

Cela dit, à la vue de toutes les pièces que j’avais fournies à mon avocat, il était selon lui très facilement possible de se retourner contre le développeur pour plusieurs motifs, et notamment son attitude déloyale découlant de son augmentation soudaine des tarifs, l’inexécution du dernier contrat pour lequel il avait été rémunéré, et je vous passe les autres motifs qui seraient trop longs à expliquer, mais pour lesquels nous pouvions réclamer remboursements et indemnités pour les préjudices causés.

Sur ces points, notre avocat était sûr de remporter gain de cause si nous devions aller jusqu’à l’assignation, d’autant plus que nous avions relevé de nombreuses contradictions dans les conversations écrites, témoignant de la mauvaise foi du développeur.

Cela constituait pour nous une marge de manœuvre, nous octroyant encore un espoir de négociation pour cette cession de droit qui nous permettrait de reprendre le contrôle du projet.

La question étant : voulons nous nous battre, sachant que cela prendrait des mois, voire des années ? Et voulons nous poursuivre ce projet, sachant qu’il était désormais largement compromis ?

Après une sérieuse réflexion, la réponse fût oui.

Après sept mois de bataille et d’échanges de courriers recommandés, notre avocat réussit à écourter la procédure en négociant “à l’amiable” la cession des droits pour une somme certes conséquente pour nos porte-monnaie, mais symbolique en comparaison des premiers montants qui avaient été évoqués par ce prestataire opportuniste.

Comment éviter ce type de désagrément à votre projet web

Tout repose dans la formulation de votre cahier des charges.

Si j’avais été un peu plus attentionné sur ce point lorsque j’ai joint à mon appel d’offre sur codeur mon cahier des charges, rien de tout cela ne serait arrivé. En effet, codeur.com explique bien aux porteurs de projets web, sur la page comment rédiger votre cahier des charges, qu’il faut prévoir une clause de cession des droits.

Il y est dit :

La cession des droits d’auteur
N’oubliez pas de mentionner dans votre cahier des charges que les droits d’auteur (exploitation, réutilisation, modification) et le code source vous seront cédés une fois le contrat rempli. Vous pourrez ainsi transmettre le site à un autre prestataire et en réutiliser le code et le contenu.

Mon projet étant au départ un site amateur, de petite envergure et sans aucune prétention, il ne m’était même pas venu à l’idée de le protéger juridiquement.

Depuis cette mésaventure, j’ai même compris que cette seule clause ne serait pas suffisante à protéger un projet, et que le mieux est de rédiger un contrat prévoyant toute la relation entre vous, votre prestataire et votre projet, et d’y annexer le cahier des charges.

Ce contrat, en plus de prévoir la cession des droits, doit aussi mentionner (entre autres) les délais de réalisation, et une obligation de résultat. En effet, lorsque nous avons reproché à notre développeur que même les 10% des fonctionnalités prévues qui avaient été réalisées n’étaient pas fonctionnels, il nous a répondu qu’il ne s’était jamais engagé sur la fonctionnalité des développements, et qu’il était normal qu’il y ait des bugs résiduels.

Face à tant de “malhonnêteté légale”, je pense qu’à la lecture de cet article, vous prendrez vos précautions si vous souhaitez vous lancer dans un projet web en faisant appel à un prestataire.

Sachez aussi que vous n’êtes pas pour autant à l’abri, car faire valoir vos droits coûte cher ! Si je n’avais pas eu un avocat spécialiste de la question, qui m’aidait à titre amical sans me facturer ses honoraires, je serais resté comme un con ! C’est pourquoi il faut blinder votre contrat de développement. Votre cahier des charges doit être hyper-détaillé afin qu’aucun des besoins de votre site ne puisse être interprété ou développé autrement que selon ce que vous souhaitez.

Bien sûr, il ne faut pas tomber dans la paranoïa, je connais beaucoup d’autres développeurs et quand je leur raconte cette mésaventure, ils sont tous scandalisés par les agissements de notre prestataire. Tout le monde n’est donc pas malhonnête. Et si vous êtes actuellement en collaboration sur le développement d’un site avec un prestataire, pour lequel vous n’avez pas signé de clause de cession de droit, il y a peu de chance que celui-ci essaye de vous la faire à l’envers. Cela dit je vous recommande tout de même de régulariser la situation avec un contrat prévoyant la cession des droits : même si ce type de problème ne se produit que sur une minorité de projets, autant bien se protéger dés le départ.

La situation aujourd’hui

Nous avons repris les développements. Nous travaillons sur la base d’un contrat pointu rédigé par notre avocat, avec cette fois-ci une équipe de vrais professionnels.

Nous avons eu le temps de repenser et d’améliorer tout notre projet. Nous recommençons presque à zéro, et ces développements coûtent chers. Afin de financer une partie de ces développements, mon associé vend sa collection Star Wars, et je me sépare de plusieurs belles pièces de ma collection Zelda (et j’avoue que ça me faite grave chier si vous me permettez l’expression.)

Mais je suis plus motivé que jamais ! Cette aventure vient renforcer la raison d’être de ce projet !

Je sais que notre projet a du potentiel : peu avant que notre site connaisse toutes ces difficultés, nous avions été invités à intervenir à une conférence organisée par un atelier de jeunes entrepreneurs français (financé par le ministère de la culture s’il vous plaît) ; de nombreux professionnels manifestaient leur désir de travailler avec nous ; et beaucoup de joueurs avaient soutenu notre initiative qui supprimait les intermédiaires et contribuait à réduire le coût des jeux vidéo d’occasion.

De plus, plusieurs sites sont sortis, copiant notre concept de petites annonces géo-sociales appliquées aux jeux vidéo, et ne se gênant pas pour reprendre carrément nos différents arguments et taglines décrivants notre positionnement. Mais nous avons une longueur d’avance sur ces nouveaux sites ! S’il y a de la concurrence, c’est qu’il y a un marché, et si la concurrence s’inspire de nos idées, c’est que nous avons les bons ingrédients. Et notre nouvelle recette mettra tout le monde d’accord, j’en suis sûr !

Nous prévoyons la nouvelle mise en ligne de notre site pour le mois de septembre 2012.